Réaliser une serrure connectée à moindre coût

Réaliser une serrure connectée à moindre coût

Pourquoi opter pour une serrure connectée maison ?

Qui n’a jamais claqué la porte en oubliant ses clés à l’intérieur ? Ou dû filer en urgence au bureau tout en se demandant si on avait bien fermé la porte d’entrée ? La domotique a une réponse à ces petits tracas du quotidien : la serrure connectée.

Problème : le prix. Entre les modèles haut de gamme vendus plus de 300 € et les systèmes à abonnements douteux, difficile de trouver un bon compromis. Mais bonne nouvelle : il est tout à fait possible de se fabriquer une serrure connectée fiable pour moins de 100 €, avec un peu de matière grise, du bricolage et quelques composants bien choisis.

Je vais vous guider pas à pas dans cette réalisation, avec une solution que j’utilise moi-même depuis plus d’un an, testée et validée dans la vraie vie — y compris sous la pluie et en plein hiver lorrain !

Objectif : ouvrir (ou fermer) sa porte avec son smartphone

Avant de passer aux choses sérieuses, posons les bases de notre projet :

  • Ajouter un système de verrouillage/déverrouillage motorisé à une serrure existante (sans remplacer la porte ni toucher à la clé extérieure).
  • Contrôler l’ouverture via un smartphone (Bluetooth ou Wi-Fi).
  • Garder une solution en secours : pouvoir toujours utiliser sa clé.
  • Limiter les coûts au maximum, sans rogner sur la sécurité ou la fiabilité.

Note importante : ici, on va parler d’un montage sur serrure européenne à cylindre classique avec accès à la tige interne. Si votre porte est équipée d’un verrou multipoint ultra-complexe de 10 kg, cette méthode ne sera pas adaptée.

Le matériel nécessaire

Voici la liste des composants que j’ai utilisés pour mon installation :

  • Un moteur pas à pas 28BYJ-48 avec driver ULN2003 (environ 5€)
  • Un microcontrôleur ESP32 (6 à 10€) — pour gérer la connexion et les commandes
  • Un adaptateur secteur 5V (type chargeur USB) ou une batterie USB si pas de prise proche
  • Un support imprimé en 3D pour le moteur (ou bricolé en bois/plastique)
  • Des tiges/courroies de fixation pour relier le moteur à la clé ou au mécanisme intégré
  • Du fil électrique, quelques vis, serre-câbles, scotch double-face ou adhésif résistant

Optionnel mais utile :

  • Un capteur magnétique pour détecter si la porte est ouverte ou fermée
  • Un bouton physique ou une télécommande Zigbee pour déverrouiller sans smartphone

Total : moins de 30 € si vous avez déjà le matos de base (genre une imprimante 3D ou un fer à souder). Sinon, comptez au maximum entre 80 et 100 € en achetant tout, contre près de 300 € pour une Nuki ou une Yale Linus.

Étapes de fabrication pas à pas

Une fois les composants réunis, il est temps de passer à la réalisation. Voici le process que j’ai suivi et que je recommande :

1. Préparer le moteur et le support

Le moteur pas à pas 28BYJ-48 est parfait pour ce projet : assez coupleux, compact, et pilotable simplement via un ESP32. Commencez par imprimer ou fabriquer un petit boîtier pour le maintenir fermement face au barillet intérieur de votre serrure. L’idée, c’est que l’axe du moteur vienne faire tourner une tige rigide reliée à la tête de la clé insérée en intérieur (ou mieux, vissée directement sur une rallonge de cylindre).

Quelques tours de fil de fer ou de colle epoxy feront aussi l’affaire si vous ne voulez pas imprimer une pièce dédiée. Faites juste gaffe à l’alignement : il faut que le moteur tourne sans forcer.

2. Configurer l’ESP32

Sur l’ESP32, on code un petit programme qui fait office de serveur web (ou utilise un appairage Bluetooth si vous préférez la simplicité). Grâce à Arduino IDE, vous pouvez rapidement flasher un petit sketch avec ces fonctionnalités :

  • Connexion à votre Wi-Fi domestique
  • Portail web sécurisé (avec mot de passe ou clé d’API) accessible localement
  • Commande des pins reliés au driver ULN2003 pour faire tourner le moteur selon un angle défini
  • Ajout potentiel : intégration MQTT ou Home Assistant pour automatiser

Une LED peut vous indiquer visuellement l’état de la serrure (rouge = verrouillé, vert = ouvert). Pratique en un coup d’œil !

3. Relier les composants et tester

Branchez le moteur à son module ULN2003, puis reliez les entrées de ce dernier aux GPIO de l’ESP32. Alimentez le tout avec une source stable (batterie USB ou adaptateur secteur 5V). Attention au courant du moteur : bien que faible, il vaut mieux éviter de pomper directement sur le régulateur de l’ESP32.

Faites tourner le moteur à vide au départ pour vérifier le sens, les angles de rotation, et testez que l’interface Web fonctionne bien :

  • Page de test responsive sur smartphone
  • Bouton « Ouvrir » et « Fermer » réactif
  • Réponse du moteur fluide, sans blocage

4. Montage final

Une fois que tout est configuré et fonctionnel en mode labo… direction la porte d’entrée ! Fixez votre système de manière solide, idéalement en extérieur côté intérieur, et masquez les fils dans une boîte ou sous une goulotte.

Pensez aussi à laisser un accès d’urgence à la serrure classique avec clé au cas où. Et si votre moteur entraîne directement l’axe côté intérieur sans faire tourner une vraie clé, prévoyez un débrayage manuel en cas de panne (genre un embrayage imprimé en 3D ou une vis accessible).

Renforcer la sécurité de votre serrure connectée

Une serrure connectée mal conçue peut devenir une faille. Voici quelques bonnes pratiques pour éviter de transformer votre maison en moulin numérique :

  • Utilisez un mot de passe sécurisé sur l’interface Web, ou mieux, un système d’authentification à double facteur via Home Assistant.
  • Bloquez toute exposition vers Internet : l’accès à la serrure reste en local, pas besoin de la rendre accessible depuis l’extérieur à moins d’être sûr de vos configs réseaux.
  • Sécurisez physiquement l’ESP32 : mettez la carte dans un boîtier fermé, à l’abri des regards et dans une zone intérieure uniquement accessible.
  • Optez pour des mécaniques de cylindre de qualité : avoir une serrure connectée, c’est bien, mais si le cylindre se crochette en 3 secondes… ça ne sert à rien. Privilégiez les modèles A2P norme 1 ou 2 étoiles.

Dans mon cas, j’ai même ajouté une alarme sur détection d’usage inapproprié (moteur qui force trop, capteur magnétique incohérent), pilotée via Node-RED et mon serveur Home Assistant.

Intégration domotique : quand la serrure devient intelligente

Une fois la serrure opérationnelle, pourquoi s’arrêter là ? Intégrée dans Home Assistant via MQTT ou ESPHome, elle devient une pièce maîtresse de votre maison connectée :

  • Automatiser l’ouverture en approchant du domicile (via géolocalisation)
  • Fermer automatiquement à heure fixe ou après une période d’inactivité
  • Notifier par push toute ouverture de porte non autorisée
  • Créer un historique d’accès (utile si vous avez des enfants ou une femme de ménage)

Et surtout, avec un simple badge NFC, un bouton Zigbee ou une commande vocale (en local !), vous ajoutez une touche de confort bien appréciable dans la routine.

Retour d’expérience : est-ce réellement fiable ?

Après plus d’un an d’utilisation quotidienne, voici les avantages et limites de cette serrure home made :

Les plus

  • Fonctionne impeccablement bien une fois bien réglée
  • Aucune latence de commande (réponse instantanée en local)
  • Ultra personnalisable (fonctionnalités, sécurité, interface)
  • Prix imbattable

Les moins

  • Un peu bruyant (le moteur n’est pas silencieux)
  • Nécessite un minimum d’entretien (graissage, recalibrer le moteur si changement de température important)
  • Moins « plug and play » qu’une solution commerciale

Mais honnêtement, pour le prix et la flexibilité, le jeu en vaut largement la chandelle. Et puis… quel geek ne rêve pas d’ouvrir sa porte comme dans un film de SF, sans sortir ses clés ? 😉

Alternative : les kits prêts à l’emploi (pour les moins aventureux)

Si vous n’êtes pas chaud pour bricoler vous-même, sachez qu’il existe quelques alternatives déjà configurées mais plus abordables que les gros noms du marché :

  • Nuki Smart Lock (version 1 en occasion) : autour de 80-100 €, contrôlable via smartphone et intégrable dans Home Assistant. Très bon compromis.
  • TTLock / Igloohome / Tuya-based : souvent d’origine asiatique, avec des fonctionnalités intéressantes mais parfois une fiabilité aléatoire. À tester avec précaution (et en local only).

Cela dit, rien ne vaut la fierté d’un système fait maison, surtout quand il fonctionne aussi bien qu’une solution 4 fois plus chère !

Alors, prêt à franchir le pas ? Si vous réalisez votre propre serrure connectée maison avec ce tutoriel, n’hésitez pas à me le faire savoir : photos, retours, idées d’améliorations… je suis toujours partant pour une nouvelle bidouille !